Dynamiques du réemploi social et solidaire en Bretagne
Dans le cadre du programme d’actions ESS et économie circulaire animé par la Cress Bretagne depuis 2017, un travail d’observation des activités et acteurs du réemploi social et solidaire est mené à l’échelle régionale. Une nouvelle enquête vient d’être réalisée.

Des structures fragilisées par la crise, mais en forte croissance !
Suite à la réalisation d’une enquête à laquelle 65 structures ont répondu, un rapport détaillé est proposé, et la cartographie réalisée en partenariat avec l’Observatoire de l’Environnement en Bretagne est en cours de mise à jour. L’un des principaux enseignements à retenir est la très forte croissance du nombre d’acteurs ESS du réemploi, qu’ils soient généralistes ou spécialisés.
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« La crise sanitaire a eu beaucoup d’impacts, de différents ordres : d'abord la réalisation d’un plan de prévention, pour lequel on s’est posé beaucoup de questions, on a beaucoup tâtonné car rien n’existait. Compte tenu des activités extrêmement variées, il a fallu prendre en compte énormément de fiches sanitaires et s’organiser avec des acteurs très différents. Ça a pris du temps, de l’énergie et ça nous a amené à reconfigurer notre organisation.
Ensuite, des impacts économiques : on a estimé avoir perdu 1/3 du chiffre d’affaires en 2020. Même si le chômage partiel et les différentes aides ont compensé en partie cela, la perte d’exploitation est sensible et impacte fortement les capacités d’investissements.
Et enfin, la crise a eu des impacts sur l’organisation matérielle et interne : réorganisation des espaces de collecte et de vente, mise en place de zones de décontamination, manutentions supplémentaires du fait des mesures d’hygiène, réorganisation des équipes et des permanences, plannings et agendas qui sont remis en cause régulièrement et deviennent vite obsolètes, etc. Le plus dur désormais pour l’équipe salariée et les administrateurs, c’est le stop and go permanent qui remet en cause toutes les échéances, tous les plannings, qui casse l’organisation, la dynamique. Ça prend ensuite énormément de temps de revenir à l’activité, y compris pour les salariés qui peuvent lâcher prise au fur et à mesure des annonces. » - Stéphane Méder, directeur de la ressourcerie Cap Solidarité Ouest Cornouaille (29)
Le réemploi en forte croissance depuis 2018
Malgré les conséquences de la crise sanitaire (fermeture des locaux et suspension des activités, chiffres d’affaires et modèles économiques impactés, afflux des apports post-déconfinement…), les activités ESS de réemploi sont en plein développement : le nombre de structures ESS de réemploi a augmenté de 33 % entre 2018 et 2021. Aujourd’hui, il existe ainsi pas moins de 80 structures ESS de réemploi pour 137 sites différents, et 15 projets en émergence ont été recensés (le nombre réel étant vraisemblablement plus élevé).
Les structures dites généralistes sont majoritaires (54 en 2021, soit une augmentation de 38 % par rapport à 2018) et leur développement ces dernières années est largement dû à des initiatives de la société civile : la mobilisation citoyenne est bel et bien au cœur de ces dynamiques.
Les structures spécialisées ou mono-flux se développent également fortement et sont désormais au nombre de 26. Elles couvrent toujours plus de flux : textiles, vélos, matériaux, DEEE, jouets et jeux, mobilier de bureau, matériel médical, etc. Cette spécialisation est amenée à se développer compte tenu des projets en émergence : recyclerie sportive, upcycling mobilier, etc.

Un maillage et des liens au territoire qui se renforcent
Cette forte croissance s’observe surtout dans des territoires ne disposant pas ou peu de structures de réemploi, notamment généralistes, à proximité. On peut ainsi observer un développement progressif de ces activités dans les petites villes et les espaces ruraux, une tendance qui permet d’affiner progressivement le maillage du territoire breton.
Historiquement, les acteurs du réemploi ESS ont le plus souvent développé des relations partenariales avec les collectivités locales, essentielles à leurs activités et à leur ancrage local. Aujourd’hui, sur les 65 structures répondantes, 56 ont au moins un partenariat avec une collectivité locale. Ces partenariats prennent des formes très variées : collectes en déchèterie (de loin le partenariat le plus courant), subventions de fonctionnement, conventions d’objectifs, mise à disposition gratuite ou à prix réduit de locaux, prestations de service, actions de sensibilisation, etc.
Cette dynamique reste à consolider pour répondre aux enjeux de société
Il réside un enjeu de consolidation et développement pour ces structures, notamment pour leur permettre de répondre à des besoins de société de plus en plus importants. Des ambitions fortes en matière d’accroissement du taux de réemploi sont désormais consacrées par un cadre juridique et règlementaire : la loi AGEC au niveau national (qui fixe notamment un objectif de réemploi à “l’équivalent de 5% du tonnage” des déchets ménagers en 2030), le PRPGD à l’échelon régional (qui rend indispensable le développement d’une offre de réemploi dans chaque bassin de vie).
LA LOI AGEC ET LE RÉEMPLOI |
La loi relative à la lutte contre le gaspillage et à l’économie circulaire prévoit de renforcer les efforts et objectifs en matière de réemploi, réparation et réutilisation. On peut notamment citer les éléments suivants :
Article 4 : Objectif de réemploi et de réutilisation en vue d’atteindre l’équivalent de 5% du tonnage des déchets ménagers en 2030 |
Article 57 : les EPCI établissent des conventions ou des contrats avec les acteurs de l’ESS et de l’économie circulaire qui en font la demande afin que ces derniers récupèrent en déchèteries des produits réparables ou en bon état […] Les déchetteries doivent prévoir une zone de réemploi |
Atteindre 5 % d‘emballages réemployés (par rapport aux emballages à usage unique) mis en marché en France en 2023 et 10 % en 2027 |
Obligation d’informer sur la qualité et les caractéristiques environnementales, notamment : durabilité, réparabilité, possibilités de réemploi, recyclabilité… |
Obligation de sensibilisation à la réduction des déchets, au réemploi et au recyclage et au geste de tri |
Obligation lors de travaux de démolition ou réhabilitation significative de bâtiments de réaliser un diagnostic relatif à la gestion des produits, matériaux et déchets issus de ces travaux |
Pour atteindre ces objectifs, il semble indispensable d’accompagner ce développement d'activités de réemploi, notamment pour parvenir à un niveau de maillage permettant d’allier proximité, services rendus à la population et au territoire, performance en termes de réemploi et modèles économiques et sociaux équilibrés.
A ce sujet, l’Ademe vient de lancer, en partenariat avec la DREAL, la Région et la Cress Bretagne, un appel à projets réemploi-réutilisation en soutien aux études et investissements, qui s’inscrit dans le cadre du Plan de Relance. Par ailleurs, des rencontres départementales sont proposées au mois de juin pour définir une stratégie de couverture territoriale cohérente dans les territoires bretons, en lien avec les travaux régionaux d’animation et de structuration du réseau déjà engagés par la Cress.
Pour en savoir plus
> Accéder au rapport d'enquête détaillé |
> Consulter la cartographie réalisée en partenariat avec l'Observatoire de l’Environnement en Bretagne |
Contact
Pour les travaux de structuration régionale en cours :
Émilie Besnier
07 55 65 91 39 ebesnier@cress-bretagne.org
Pour plus de précisions sur l’enquête et les projets émergents :
Baptiste Bertrand
07 48 72 38 56 bbertrand@cress-bretagne.org
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Le réemploi social et solidaire en Bretagne
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