Histoires collectives
Quand la bonne affaire se fait en déchèterie
Le Smictom Valcobreizh a lancé les vide-déchèteries, un concept novateur. Tandis que les habitants peuvent faire de bonnes affaires et que le volume de déchets partant au rebut diminue, les recettes générées profitent aux associations locales. Explications.
Avez-vous déjà fait une bonne affaire en déchèterie ? A priori non, puisqu’en déposant de vieux objets, on n’est pas censé repartir avec d’autres qui nous font de l’œil.
Désormais, si vous habitez sur le territoire du Smictom Valcobreizh, c’est possible !
« En 2017, nous avons commencé à travailler sur le programme de réhabilitation des sept déchèteries de notre territoire. Des caissons de réemploi, dans lesquels les citoyens sont invités par les agents à mettre leurs objets en bon état et pouvant être réutilisés, ont été installés dans celles de Tinténiac, Liffré et Combourg. Ils se remplissaient rapidement, nous avons donc pensé à faire des vide-déchèteries » - Ronan Salaün, président du Smictom, service de gestion des déchets regroupant 52 communes, cinq communautés de communes et plus de 94 000 habitants.
Au départ, un partenariat a été envisagé avec Emmaüs Hédé, qui ne s'est finalement pas concrétisé pour des raisons logistiques. C’est là que les associations locales sont entrées dans la boucle pour mettre en œuvre concrètement ces vide-déchèteries, en vendant les objets. Elles récupèrent ainsi les recettes. Ce territoire breton ne compte pas de ressourceries ou recycleries (hormis Emmaüs), mais sur d'autres, les vide-déchèteries pourraient être organisés en collaboration avec ces structures.
10 tonnes d’objets pour 9000 euros de recettes
Liffr’échange, un système d’échange local à Liffré, qui compte aussi désormais des jardins partagés, un Repair café ou encore un poulailler collectif, a participé à quatre vide-déchèteries, dont le premier, en juin 2021. « Le principe va tout à fait dans le sens de nos actions, c’était donc naturel pour nous de dire oui », explique Franck Leconte, membre de l’association.
Même constat pour Au Bois des ludes, une ludothèque itinérante en Bretagne romantique, qui s’est impliqué dans un vide-déchèterie à Combourg en octobre 2022. « Nous-mêmes achetons beaucoup d’occasion et avant le Covid proposions aussi des ventes. Le principe nous a paru très intéressant et pertinent. La veille de l’événement, nous avons fait du tri parmi les objets du caisson réemploi. Et le jour même, nous nous sommes chargés d’accueillir les acheteurs, de les renseigner et donc de vendre les objets », indique Bénédicte Briend, coordinatrice de la ludothèque. Le Smictom, quant à lui, s’occupe de la communication autour de l’événement et contractualise avec la commune en question pour la mise à disposition de tables, de barrières de sécurité…
Et le moins que l’on puisse dire, c’est que ces événements sont un réel succès. 12 vide-déchèteries ont été organisés depuis un an et demi, 3 à Combourg et 9 à Liffré. 10 tonnes d’objets ont ainsi été vendues, pour environ 9000 euros.
« En majorité, nous avons vendu de la vaisselle, des jouets, des livres, de la déco, mais aussi des outils de bricolage ou encore du petit électroménager. Nous étions en partenariat avec l’association Rey-Leroux, de La Bouexière, qui s’était chargé de nettoyer les objets et de vérifier qu’ils fonctionnaient. Ce qui est parti le plus vite à chaque fois, ce sont les quatre ou cinq vélos, en à peine quinze minutes. Ils avaient besoin de petites réparations, mais nous avions au préalable vérifié les freins » - Franck Leconte, membre de l'association Liffr’échange.
Public venu en nombre et de loin
Pas de prix indiqués sur les articles à vendre, les acheteurs donnent ce qu’ils veulent. En l’occurrence, cela correspond en moyenne à 1 euro par kilo. « Certains donnent moins que la valeur de l’objet, d’autres beaucoup plus, cela s’équilibre bien », ajoute Franck Leconte. « Nous avons été très surpris par le fait que certains visiteurs étaient présents une heure avant l’ouverture. En quarante-cinq minutes, nous avions déjà écoulé la moitié de la marchandise », souligne Bénédicte Briend, d’Au Bois des ludes. Un élément qui a aussi étonné les organisateurs, c’est la provenance du public, dont une partie venait de communes plutôt lointaines ! « Nous nous doutions que cela plairait, mais peut-être pas autant ! Il y a sans doute plusieurs raisons à ce succès : les citoyens qui se disent qu’il y a une bonne affaire à faire, l’envie de participer au réemploi en achetant un jeu ou de la vaisselle », souligne Ronan Salaün. « Et aussi celle de donner de l’argent à une association locale, pour des projets qu’ils vont pouvoir suivre », estime Anne-Bénédicte Martinot, responsable du service prévention déchets et économie circulaire au Smictom.
Liffr’échange a ainsi utilisé la recette pour ses différents projets – en achetant par exemple une bâche pour couvrir le poulailler collectif –, tandis que cela permet à la ludothèque de proposer des adhésions suspendues. « Même si notre adhésion est plutôt abordable – 17 euros par an –, nous imaginons que cela peut freiner des familles. La recette du vide-déchèterie va donc permettre de financer leur cotisation », indique Bénédicte Briend.
Pour 2023, un vide-déchèterie sera organisé chaque mois. Le Smictom a aussi été contacté par d’autres territoires (bretons, mais pas que!) souhaitant en savoir plus. Peut-être cette initiative, écologique et sociale, va-t-elle essaimer un peu partout d’ici quelques années !
Propos recueillis et rédaction : Claire Baudiffier
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